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L'égoïsme

Question : Pourquoi sommes-nous fondamentalement égoïstes? Nous avons beau faire de notre mieux pour ne pas nous comporter en égoïstes, quand notre propre intérêt est en jeu, nous devenons égocentriques et indifférents aux intérêts des autres.

Krishnamurti : Je crois qu'il est très important de ne surtout pas se définir comme étant égoïste ou dénué d'égoïsme, car les mots ont une énorme influence sur l'esprit. Qualifiez un homme d'égoïste, et il est condamné d'avance ; appelez-le professeur, et cela vous influence dans votre approche ; appelez-le mahatma, et le voilà immédiatement nimbé d'une auréole! Observez vos propres réactions et vous verrez que des mots tels qu'« avocat », « homme d'affaires », « gouverneur », « serviteur », « amour », « Dieu » ont un étrange effet sur vos nerfs comme sur votre esprit.


Le terme désignant une fonction particulière suscite en nous un réflexe d'association à un statut social ; la première chose à faire est donc de se libérer de cette habitude inconsciente d'associer certains sentiments à certains mots, ne croyez-vous pas? Votre esprit a été conditionné à penser que le terme « égoïste » représente quelque chose de très répréhensible, contraire à la spiritualité, et dès que vous appliquez ce terme à quoi que ce soit, votre esprit le condamne. Donc, lorsque vous posez la question: « Pourquoi sommes-nous fondamentalement égoïstes? », elle implique déjà une condamnation.


Il faut impérativement que vous soyez conscient que certains mots suscitent en vous une réaction nerveuse, émotionnelle ou intellectuelle d'approbation ou de condamnation. Si vous vous définissez, par exemple, comme étant jaloux, vous bloquez immédiatement toute enquête plus approfondie, vous cessez d'emblée d'explorer l'ensemble du phénomène de la jalousie. De même, de nombreuses personnes disent œuvrer dans le sens de la fraternité, et pourtant tous leurs actes vont à l'encontre de celle-ci ; mais ils ne voient pas les faits, parce que le mot « fraternité » a une haute signification à leurs yeux, et étant déjà sous l'emprise du terme, ils ne cherchent pas à en savoir plus sur la réalité des faits - hors de toute considération liée à la réaction neurologique ou émotionnelle que déclenche ce mot.


La première chose à faire est donc d'expérimenter, et de chercher à savoir si vous pouvez regarder les faits en faisant abstraction de toutes les connotations critiques ou élogieuses associées à certains mots. Si vous êtes capable de voir les faits sans aucun sentiment de condamnation ou d approbation, vous découvrirez que ce processus d'examen fait voler en éclats toutes les barrières que l'esprit a érigées entre lui-même et les faits.


Observez simplement comment vous abordez une personne unanimement qualifiée de grand homme. Le terme de « grand homme » vous influence: tous - ses partisans, mais aussi les journaux et les livres - disent de lui que c'est un grand homme, et votre esprit l'admet. A moins que vous ne preniez le contre-pied en disant: « Quelle stupidité! Ce n'est pas un grand homme. » Si, en revanche, vous pouvez dégager votre esprit de toute influence et vous en tenir aux faits, vous vous apercevrez que votre approche est tout à fait différente. De la même façon, le mot « villageois », associé à la pauvreté, à la saleté, à la misère noire, ou que sais-je encore, influence votre manière de penser.


Mais lorsque l'esprit est libre de toute influence, quand il ne condamne ni n'approuve, mais qu'il se contente de regarder, il cesse alors d'être égocentrique, et ce problème de l'égoïsme qui veut se transformer en son contraire n'existe plus. - Jiddu Krishnamurti


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