Là où est l'attention est la réalité
Les nuages amoncelés à l'horizon masquaient les collines et les montagnes environnantes. Il avait plu tout le jour, une bruine légère qui n'avait entraîné nulle terre, et l'air embaumait le jasmin et la rose. Le blé mûrissait dans les champs. Parmi les rochers, là où venaient brouter les chèvres, on voyait quelques buissons bas et quelques vieux arbres noueux.

Il y avait au sommet de la colline une rivière qui ne se tarissait ni l'été ni l'hiver et l'eau faisait un bruit agréable en descendant de la colline, dépassant un bosquet d'arbres et allant se perdre parmi les champs de la plaine au-delà du village. Les paysans, dirigés par un ingénieur de la région, édifiaient un petit pont en pierres sur cette rivière. C'était un vieil homme amical et tous travaillaient sans se presser lorsqu'il était là. Mais en son absence, seuls deux ou trois paysans continuaient. Les autres, posant leurs outils et leurs paniers, s'asseyaient et discutaient entre eux.
Suivant le sentier qui longeait la rivière, un paysan apparut suivi d'une douzaine d'ânes. Ils revenaient de la ville voisine, leurs sacoches vides. Ces ânes avaient des pattes minces et gracieuses et trottaient rapidement, s'arrêtant ici et là pour brouter l'herbe verte bordant la petite route. Ils rentraient chez eux, et il n'était pas nécessaire de les diriger. Des lopins de terre cultivée jalonnaient le chemin, et une brise légère faisait frissonner le blé nouveau. Une femme, dans une petite maison, chantait d'une voix claire, et les larmes vous venaient aux yeux, non pas à cause d'une souvenance nostalgique, mais de par la seule beauté du chant.
Assis sous un arbre, la totalité de la terre et du ciel pénétrait votre être. Au-delà du chant et de la terre rouge était le silence, ce silence authentique dans lequel la vie tout entière est en mouvement. On voyait maintenant des lucioles parmi les arbres et les buissons, brillantes et vives dans l'obscurité naissante. On était étonné de la clarté qu'elles produisaient. La lumière douce et intermittente d'une seule luciole posée sur un rocher sombre semblait contenir toute la lumière du monde.
Il était jeune et très sincère et avait des yeux clairs et vifs. Bien qu'ayant une trentaine d'années, il n'était pas encore marié, mais il précisa que la sexualité et le mariage n'étaient pas un problème d'importance. De constitution robuste, il avait des gestes vigoureux et une démarche sportive. Il n'était pas très enclin à la lecture mais avait lu cependant un certain nombre d'ouvrages sérieux et y avait réfléchi. Travaillant dans un quelconque ministère, il gagnait relativement bien sa vie. Il aimait les sports, surtout le tennis et il y excellait de toute évidence. Il ne s'intéressait pas au cinéma et n'avait que peu d'amis.
Il avait pour habitude, expliqua-t-il, de consacrer environ une heure, matin et soir, à la méditation. Après avoir écouté les causeries des jours précédents, il avait décidé de venir s'informer de la signification de la méditation. Petit garçon, il lui arrivait souvent d'aller avec son père dans une pièce consacrée à la méditation, et de réussir à y rester une dizaine de minutes, ce qui ne semblait pas déranger son père. Il y avait un seul tableau sur le mur de cette chambre, et les membres de la famille ne s'y rendaient que pour méditer. Bien que son père ne l'ait jamais encouragé ou découragé sur ce point, et ne lui ait jamais dit comment méditer, ni ce que cela représentait, il avait toujours aimé méditer. Pendant sa scolarité, il lui avait été difficile de le faire régulièrement, mais plus tard, dès qu'il commença à travailler, il s'était remis à méditer une heure matin et soir et aujourd'hui il ne se priverait pour rien au monde de ces deux heures de méditation.
— Je ne suis pas venu pour discuter ou pour justifier mes opinions, mais pour apprendre. J'ai lu ce qui concerne les différentes formes de méditation appliquées aux divers tempéraments, et j'ai élaboré ma propre façon de contrôler mes pensées, mais je ne suis pourtant pas assez naïf pour penser que je pratique une méditation authentique. Ceux qui font autorité en la matière préconisent, si je ne m'abuse, la maîtrise de la pensée et cela me semble en être l'essence même. J'ai fait également un peu de yoga, comme moyen d'apaiser l'esprit: certains exercices respiratoires, la répétition de certains mots et de certains chants, etc. Je vous dis tout cela pour me situer, et cela n'a peut-être pas d'importance. Mais ce qui est sûr, c'est que la pratique de la méditation m'intéresse profondément, c'est pour moi vital, et je veux en apprendre davantage sur ce sujet.
La méditation n'a de sens qu'à partir du moment où l'on comprend celui qui médite. Dans la pratique de ce que vous appelez ainsi, méditation et méditant sont deux choses séparées, n'est-ce pas ? Pourquoi cette différence, cette distance entre eux ? Est-ce inévitable, ou bien la distance doit-elle être abolie ? Si l'on ne comprend pas parfaitement la véracité ou la fausseté de cette division apparente, les résultats obtenus par cette soi-disant méditation sont identiques à ceux auxquels on parvient en prenant des tranquillisants pour apaiser l'esprit. Si l'on a pour but de dominer sa pensée, on peut utiliser pour ce faire n'importe quel système ou n'importe quelle drogue.
— Vous balayez d'une seule phrase tous les exercices du yoga et les systèmes de méditation traditionnels qui ont été pratiqués et préconisés au cours des siècles par tant de saints hommes et d'ascètes. Auraient-ils tous tort ?
Pourquoi n'auraient-ils pas tort ? Pourquoi cette crédulité ? Un certain scepticisme n'aide-t-il pas à comprendre le problème de la méditation ? Vous admettez tout cela parce que vous êtes avide de résultats, de réussite, vous voulez « arriver ». Mais pour comprendre ce qu'est la méditation, il faut interroger, remettre en cause, et le fait d'admettre interdit l'interrogation. Il vous faut découvrir par vous-même le faux en tant que faux, et le vrai en tant que vrai. Personne ne peut vous instruire à ce sujet. La méditation est dans la vie et fait partie du quotidien, et la plénitude et la beauté de la vie ne se comprennent que par la méditation. Si l'on ne comprend pas la totalité complexe de la vie, et les réactions quotidiennes au fur et à mesure qu'elles ont lieu, la méditation devient un processus d'auto-hypnotisme. La méditation du cœur, c'est la compréhension des problèmes journaliers. On ne peut aller très loin si l'on ne débute pas par le très proche.
— Je suis tout à fait d'accord. On ne peut escalader la montagne sans avoir au préalable traversé la vallée. Je me suis efforcé, dans ma vie quotidienne, d'enlever les obstacles évidents, comme la rapacité, l'envie et les choses de ce genre, et à ma grande surprise j'en suis arrivé ainsi à me défaire des choses de ce monde. Je conçois parfaitement que des fondations sérieuses et authentiques soient indispensables, car sinon aucun édifice ne peut rester debout. Mais la méditation n'est pas uniquement une pratique qui consiste à mater les désirs dévorants et les passions. Les passions doivent être assujetties et maîtrisées. Mais il entre certainement autre chose dans la méditation, une dimension supplémentaire, n'est-ce pas ? Je ne fais pas référence aux autorités consacrées, mais j'ai profondément l'impression que c'est quelque chose de beaucoup plus vaste que le seul fait d'établir des fondations correctes.
C'est possible. Mais la totalité existe dès l'origine. Il ne suffit pas de poser de bonnes fondations, puis de construire, ou de se libérer tout d'abord de l'envie, puis d' « arriver ». C'est dans le départ qu'est la fin. Il n'existe pas de distance à parcourir, pas d'ascension à faire, pas de point à atteindre. La méditation est d'essence intemporelle, mais n'est pas un moyen de parvenir à un état intemporel. Elle est tout simple- ment, sans début et sans fin. Mais ce ne sont là que des mots et cela le restera aussi longtemps que vous ne vous interrogerez pas et que vous ne comprendrez pas ce qui est vrai et ce qui est faux par rapport à celui qui médite.
— Pourquoi est-ce tellement important ?
Le méditant est le censeur, l'observateur, celui qui fait de « bons » et de « mauvais » efforts. Il est le centre, et à partir de ce point il tisse le filet de la pensée. Mais c'est la pensée qui a créé ce méditant, c'est la pensée qui a établi cette distance entre le penseur et le pensé. Si cette division ne cesse pas, la soi-disant méditation ne sert qu'à renforcer le centre, l'expérimentateur qui se situe lui-même en dehors de l'expérience. L'expérimentateur désire toujours ardemment davantage d'expériences, et chacune d'elles renforce l'accumulation des expériences passées qui à son tour régit et modèle l'expérience présente. En sorte que l'esprit ne cesse de se conditionner lui-même, et que l'expérience et la connaissance ne sont plus les facteurs libérateurs qu'ils sont censés être.
— Je crois que je ne comprends pas, dit-il avec perplexité.
L'esprit n'est libre qu'à partir du moment où il n'est plus conditionné par ses propres expériences, par le savoir, la vanité, l'envie. Et la méditation, c'est précisément libérer l'esprit de toutes ces choses, de toutes ces activités qui tournent autour du moi et de ses influences.
— Je comprends qu'il faille libérer l'esprit de toutes les activités du moi, mais je ne vois pas très bien ce que vous voulez dire par influences.
Votre esprit est-il autre chose qu'une suite d'influences ? Depuis l'enfance vous êtes mentalement influencé par la nourriture que vous recevez, par le climat dans lequel vous vivez, par vos parents, par les livres que vous lisez, par l'environnement socio-culturel dans lequel vous êtes élevé, et ainsi de suite. On vous apprend ce qu'il faut croire et ce qu'il ne faut pas croire ; votre esprit est le produit du temps, c'est-à-dire du souvenir et du savoir. Toute expérience est un processus d'interprétation dans les termes du passé, du connu, et n'aboutit pas à nous libérer de ce connu, car ce n'est qu'une continuité modifiée de ce qui a été. L'esprit n'est libre que dans la mesure où cette continuité cesse.
— Mais comment sait-on que son esprit est libre ?
C'est ce désir même de certitude, de sécurité qui est à l'origine de l'asservissement. Lorsque l'esprit n'est pas pris dans le filet de la certitude, et ne recherche pas celle-ci, alors - et alors seulement-il est en état de découverte.
— L'esprit recherche en effet la certitude en toutes choses, et je vois que ce désir peut être un obstacle.
Ce qui est important, c'est de mourir à tout ce qu'on a accumulé, car cette accumulation constitue le soi, l'ego, le moi. Si l'on ne met pas un terme à cette accumulation, ce désir de la certitude continue à s'affirmer, ainsi que la continuation du passé.
— Je commence à réaliser que la méditation n'est pas quelque chose de simple. Contrôler sa pensée est relativement facile, et adorer une image, ou répéter certains mots et certains chants, n'est rien d'autre qu'endormir l'esprit. Mais la véritable méditation semble être beaucoup plus complexe et difficile que je l'aurais jamais imaginé.
Ce n'est pas vraiment complexe bien que cela puisse être difficile. C'est que voyez-vous, nous ne commençons pas par le fait réel, par ce que nous pensons, faisons ou désirons. Nous commençons par des suppositions, ou des idéaux, qui n'ont rien de réel et c'est pour cela que nous nous égarons. Pour s'en prendre à la réalité, et non à des suppositions, il faut être extrêmement attentif, et toute forme de pensée qui n'a pas le réel pour origine est une distraction. C'est en cela qu'il est essentiel de com- prendre ce qui se passe réellement en nous et autour de nous.
— Les visions ne sont-elles pas réelles ?
Le sont-elles ? Essayons de le découvrir. Si vous êtes Chrétien, vous aurez des visions d'un certain type, et si vous êtes Hindou, Bouddhiste ou Musulman elles seront fonction d'un autre modèle. Vous voyez le Christ, ou vous voyez Krishna, selon votre conditionnement, et c'est votre éducation, la culture dans laquelle vous avez été élevé, qui détermine les visions en questions. Qu'est-ce qui est réel: la vision, ou l'esprit qui a été façonné selon un certain modèle ? La vision est la projection de la tradition particulière qui se trouve constituer l'arrière-plan de l'esprit. C'est ce conditionnement, et non pas la vision qu'il projette, qui est la réalité, le fait. Il est simple de comprendre le fait réel, mais cela est rendu difficile par ce que nous aimons et ce que nous détestons, par notre condamnation du fait en question, et par les opinions et les jugements que nous portons sur ce fait réel. Se libérer de ces diverses formes d'évaluation, c'est saisir la réalité, comprendre ce qui est.
— Cela revient à dire que nous ne considérons jamais directement le fait réel, mais toujours au travers de nos préjugés et de nos souvenirs, de nos traditions et de nos expériences qui reposent d'ailleurs sur ces mêmes traditions. Pour reprendre nos propres paroles, nous n'avons jamais conscience de nous-mêmes en tant que ce que nous sommes réellement. Et il est clair que vous avez raison. Le fait réel est la seule chose qui importe.
Essayons d'aborder le problème différemment. Qu'est-ce que l'attention ? Quand êtes-vous attentif ? Faites-vous jamais vraiment attention à quoi que ce soit ?
— Je suis attentif lorsque quelque chose m'intéresse. L'intérêt est-il l'attention ? Lorsque vous êtes intéressé
par quelque chose, que se passe-t-il dans l'esprit ? Vous êtes de toute évidence intéressé par ce bétail qui passe, de quelle nature est cet intérêt ?
— Je suis attiré par leurs mouvements, leurs formes, leurs couleurs, contre ce fond de verdure.
Entre-t-il de l'attention dans cet intérêt ? — Oui, je crois. L'enfant est absorbé par son jouet. Diriez-vous qu'il s'agit d'attention ? — N'est-ce pas le cas ?
Le jouet absorbe l'intérêt de l'enfant, prend possession de son esprit et le rend calme et tranquille. Mais retirez-lui le jouet et l'enfant s'agite à nouveau, se met à crier et ainsi de suite. Les jouets deviennent importants parce qu'ils l'apaisent. Il en va de même chez les adultes. Privez-les de leurs jouets - l'activité, la croyance, l'ambition, l'envie du pouvoir, le culte de dieux ou de l'État, la défense d'une cause quelconque - et eux aussi deviennent nerveux, inquiets et perturbés. De sorte que les jouets des adultes sont également revêtus d'une grande importance. Peut-on parler d'attention lorsque l'esprit est absorbé par le jouet ? Le jouet est une distraction, n'est- ce pas ? Toute l'importance est alors accordée au jouet, et non plus à l'esprit qui est obnubilé par le jouet. Pour comprendre ce qu'est l'attention, nous devons nous préoccuper de l'esprit, et non des jouets de l'esprit.
— Nos jouets, ainsi que vous les appelez, retiennent l'intérêt de l'esprit.
De tels jouets peuvent être un Maître, un tableau, ou n'importe quelle image concrète ou mentale. Et c'est cette prise de possession de l'esprit par un jouet que l'on nomme la concentration. Est-ce de l'ordre de l'attention ? Lorsque vous vous concentrez de cette manière en fixant votre esprit sur un jouet, êtes-vous attentif ? N'est-ce pas plutôt une façon de rétrécir l'esprit ? Est-ce cela l'attention ?
— Étant donné que j'ai pratiqué la concentration, je peux dire qu'il faut lutter pour maintenir l'esprit fixé sur un certain point, à l'exclusion de toute autre pensée, de toute distraction.
Est-on attentif lorsqu'on résiste aux distractions ? La distraction, de toute évidence, intervient à partir du moment où l'esprit a perdu tout intérêt pour le jouet, et c'est alors qu'apparaît le conflit, n'est-ce pas ?
— Oui, cela crée un conflit de vaincre les distractions. Peut-on être attentif lorsque l'esprit est habité par un conflit ?
— Je commence à voir où vous voulez en venir. Continuez, je vous en prie.
Lorsque le jouet absorbe l'esprit, il n'est pas d'attention, pas plus qu'elle n'existe lorsque l'esprit lutte pour se concentrer en rejetant toutes les distractions. Aussi longtemps qu'existe un objet d'attention, peut-on parler d'attention ?
— Ne dites-vous pas la même chose, en mettant « objet » à la place de « jouet »?
L'objet, ou le jouet, peut être extérieur. Mais il existe aussi des jouets intérieurs, n'est-ce pas ?
— Oui, et vous en avez cité quelques-uns. Je l'ai remarqué.
Un jouet beaucoup plus complexe, c'est la motivation. L'attention existe-t-elle lorsqu'elle a une motivation ?
— Une motivation ?
Une compulsion à agir, un besoin effréné d'auto-amélioration qui repose sur la peur, la rapacité, l'ambition, une raison qui vous pousse à chercher, une souffrance à laquelle vous voulez échapper, et ainsi de suite. Y a-t-il attention lorsqu'une motivation cachée vous agit ?
— Lorsque la douleur ou le plaisir me contraignent à être attentif, ou la peur ou l'espoir d'une récompense, il ne s'agit pas vraiment d'attention. Oui, je comprends. C'est très clair, en effet.
Nous ne sommes nullement attentifs lorsque nous appréhendons les choses de cette manière. Et le mot, le nom, ne gênent-ils pas l'attention ? Nous arrive-t-il jamais, par exemple, de regarder la lune sans que s'ensuive un quelconque verbiage, ou bien le mot « lune » vient-il toujours gêner notre perception ? Écoutons-nous jamais attentivement, ou bien nos pensées, nos interprétations et tout le reste gênent-ils notre écoute ? Sommes-nous jamais attentifs à quoi que ce soit? L'attention, de toute évidence, n'a pas de motivation, pas d'objet, pas de jouet et n'est pas synonyme de lutte ni de verbiage. Et celle-ci est l'attention véritable, n'est-ce pas ? Là où est l'attention est la réalité.
— Mais il est impossible d'accorder une si totale attention à n'importe quoi! s'écria-t-il. Si on le pouvait, il n'y aurait plus de problèmes.
Toutes les autres formes d'« attention » font-elles autre chose que d'amplifier les problèmes ?
— Je dois reconnaître que non, mais que peut-on y faire ?
Lorsque vous comprenez que toute concentration sur un jouet, toute action ayant une motivation, quelle qu'elle soit, ne font en définitive que renforcer la souffrance et la malfaisance, c'est cette perception du faux qui vous permet de voir le vrai, et la vérité engendre sa propre action. C'est tout cela la méditation.
— Je me permets de vous dire que je vous ai écouté correctement, et que j'ai réellement compris nombre de choses que vous avez dites. Ce qui a été compris aura son propre effet, sans que j'intervienne en quoi que ce soit. J'espère pouvoir revenir. - J.K.
Note 30 - Là ou est l'attention est la réalité - Commentaire sur la vie tome 3